Névralgies du Trijumeau : indications et techniques chirurgicales

, par  Andreï BRINZEU, Emile SIMON, George GEORGOULIS, Marc SINDOU , popularité : 26%

Données d’observation anatomo-pathologiques

Les constatations opératoires faites chez les patients ayant eu un abord direct de la racine trigéminale font état d’une compression vasculaire de la racine dans 93% des cas en moyenne d’après la littérature. Dans une série personnelle de 579 patients opérés [35], 96,7% avaient un vaisseau en position conflictuelle, allant du stade de simple contact dans 17,6 % des cas, à celui d’indentation dans 33,2%, en passant par celui de déplacement/déformation de la racine dans 49,2% des cas. En d’autres termes, seulement 3,3% des patients de la série ne présentaient aucune compression vasculaire visible à l’exploration opératoire. L’agent vasculaire responsable était :

  1. une dolicho-artère cérébelleuse supérieure - seule ou en association avec un autre (ou plusieurs autres) vaisseau(x) conflictuel(s) - dans 88% des cas,
  2. une dolicho- artère cérébelleuse antéro-inférieure (seule ou en association) dans 25,1% des cas,
  3. une veine enchâssée dans la racine (isolément dans 7% des cas ou en association avec une artère dans 20,5% des cas),
  4. une mégadolicho-artère vertébrobasilaire (seule ou en association) dans 3,5% des cas.

Fait capital expliquant ces pourcentages dont la somme est supérieure à 100%, il existait plusieurs vaisseaux conflictuels en association chez le même patient dans 37,8% des cas. Le fait de ne pas les reconnaître tous, et donc de les traiter tous, pourrait aboutir à un échec ou une récidive après traitement (Figure 2).

Localisation des conflits vasculo-nerveux le long de la racine trigéminale (sur un schéma en vue postérieure, à droite).

Figure 2 :
Localisation des conflits vasculo-nerveux le long de la racine trigéminale (sur un schéma en vue postérieure, à droite).
Dans notre étude [36], les conflits étaient localisés :
1. Sur la portion juxtapontique, c.à.d. la TREZ (Trigeminal Root Entry Zone), dans 52,3% des cas, comme sur cette vue opératoire d’une artère cérébelleuse supérieure pulsant dans « l’aisselle » de la racine, au niveau de la portion centrale de la racine.
2. Au niveau de la portion médio-cisternale, dans 54.2% des cas, comme cette artère cérébelleuse supérieure reposant « en hamac » sur la racine et exerçant un étirement de celle-ci et une traction pulsatile sur la TREZ ;
3. A la portion juxta-pétreuse après la sortie de la racine du porus de Cavum de Meckel, dans 9.8% des cas. Dans l’exemple correspondant, la compression vasculaire était celle d’une veine transverse inférieure ; l’empreinte que cette veine exerçait sur la racine est bien visible sous la forme d’une zone de demyélinisation focale, de couleur grisâtre, pouvant être le siège d’influx ectopiques parasites et de court-circuits entre les fibres (= phénomènes ephaptiques).
[P .M . : pars major, p.i. : pars intermediaris, p.m. : pars minor]

En association aux conflits vasculo-nerveux ont été souvent observées d’importantes altérations de la racine. C’est ainsi que dans notre série chez 42% des patients existait une atrophie globale de la racine, correspondant vraisemblablement à une neuropathie coexistante. Chez 18,2% des patients, existait un épaississement local de l’arachnoïde, adhésif à la racine. Chez 12,6% des patients la racine faisait une angulation marquée à son passage sur le bord supérieur du rocher à sa sortie du cavum de Meckel. Enfin dans 3,9% la racine était comprimée entre le pont et le rocher du fait de la petitesse de la fosse cérébrale postérieure [24]. Toutes ces associations pathologiques doivent être prises en considération dans l’indication et lors de la décompression chirurgicale du nerf. Une étude fine par IRM permet de prévoir et donc de tenir compte, pour et dans la chirurgie, de chacune de cas anomalies.