Gliomes diffus de bas grade

, par  Hugues DUFFAU , popularité : 5%
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RESUME

Les gliomes diffus de bas grade (grade II OMS) constituent un sous-groupe de tumeurs cérébrales primitives rares et hétérogènes, qui touchent généralement des patients jeunes menant une vie normale jusqu’à la survenue d’une crise d’épilepsie inaugurale. La meilleure connaissance de l’histoire naturelle de ces gliomes, à savoir leur croissance régulière, leur infiltration le long des fibres blanche et surtout le risque de transformation maligne – mettant ainsi en jeu les pronostics fonctionnel et vital – associée à une minimisation des risques de traitements, a transformé l’attitude abstentionniste « classique » en une stratégie résolument thérapeutique. Le but est désormais d’élaborer des prises en charge dynamiques et personnalisées, à savoir de définir l’ordre et le moment de chacun des traitements (1ère voire multiples résections chirurgicales maximalistes effectuées selon des limites fonctionnelles cortico-sous-corticales, 1ère voire multiples lignes de chimiothérapie, radiothérapie) en fonction de la progression tumorale (mesurée sur les IRM de surveillance régulières), de l’état clinique et neurocognitif ainsi que de l’anatomie fonctionnelle cérébrale individuelle (étudiée par les techniques de cartographie, et susceptible de se réorganiser grâce aux phénomènes de neuroplasticité), afin d’éviter la transformation maligne le plus longtemps possible tout en préservant la qualité de vie. Seule une approche pluridisciplinaire voire en réseaux multicentriques peut permettre de donner un avenir réel aux patients porteurs de cette maladie cérébrale chronique, avec la possibilité de concevoir des projets à long-terme tant sur le plan socioprofessionnel que familial. La prochaine étape serait celle d’un dépistage précoce afin de proposer un traitement préventif.

I - DEFINITION

Les gliomes de bas grade, tumeurs primitives du système nerveux central développées aux dépens des cellules gliales, englobent selon la classification de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) les gliomes de grade I et II (44).
Les premiers sont représentés par les astrocytomes pilocytiques, gangliogliomes, astrocytomes sous-épendymaires à cellules géantes, ainsi que par les tumeurs dysembryoplasiques neuroépithéliales, d’individualisation plus récente et rattachées au groupe des tumeurs mixtes glioneuronales (44). Il s’agit généralement de tumeurs bénignes, volontiers pédiatriques, bien délimitées par rapport au parenchyme cérébral, et dont l’exérèse chirurgicale seule peut permettre une rémission complète pendant plusieurs décennies - voire une véritable guérison.
A l’inverse, les gliomes de grade II, à savoir les gliomes diffus de bas grade (GDBG) supra-tentoriels de l’adulte, du fait de leur croissance constante, de leur caractère très infiltrant et de leur transformation maligne inéluctable, sont plus difficiles à appréhender. En effet, les GDBG, qui englobent les astrocytomes, oligodendrogliomes et oligoastrocytomes de grade II, constituent une entité hétérogène regroupant des tumeurs cérébrales complexes avec différentes caractéristiques clinique, radiologique, histologique et moléculaire. Ils ne doivent plus être considérés comme des tumeurs « bénignes », mais bien comme des tumeurs cancéreuses « pré-malignes ». C’est grâce à la meilleure compréhension de leur histoire naturelle que les stratégies thérapeutiques se sont radicalement modifiées ces dernières années, aboutissant actuellement à des stratégies individualisées basées sur des thérapies précoces et répétées - et non plus sur une simple surveillance, comme longtemps prônée (26). Ainsi, ce chapitre sera délibérément dévolu à l’étude spécifique des GDBG chez l’adulte.

II - EPIDEMIOLOGIE

Les GDBGs représentent approximativement 15% des gliomes, avec une incidence de l’ordre de 1/100 000 habitants par an, et une prévalence de 9/100 000 habitants (60). La médiane d’âge des patients est située entre 35 et 40 ans. En effet, dans une série récente du Réseau Français d’Etude des Gliomes (REG) portant sur 1091 patients, l’âge médian était de 37 ans lors du diagnostic (8). Le sexe ratio (homme/femme) est évalué autour de 1,32 (60), avec une prédominance de GDBG chez les hommes caucasiens. Le seul risque environnemental reconnu correspond aux radiations ionisantes (64). Aucun des autres facteurs envisagés en théorie (produits chimiques, téléphones portables, facteurs héréditaires, etc…) n’ont jamais pu être démontrés comme déterminants dans le développement d’un GDBG – dont l’origine reste inconnue. A noter toutefois l’existence d’une probable relation inverse entre les allergies et le risque de gliome.